C'est la rue de nos amours ... tout au long d'un vieux faubourg ......Lorsque la mémoire m'interpelle et que me monte au coeur un demi-siècle de souvenirs de notre faubourg St-Jacques, une farandole de visages amis danse devant mes yeux ... je revois Roger et Odette, Jules et Toinette, Lucien et Nana, Jeanne "femme mineur", qui en a tant vu !... et aussi Roger et Lulu, Raymond et Mauricette ... et encore Fernande, Delphine, Aimée, Pierrot et Odette, Baptiste et Renée, Gustave et Maria, Guy, Jean, Marie mais aussi Bébert et Thérèse, Madeleine et Joséphine ......... et les enfants, nombreux .... Si certains prénoms m'échappent, j'ai bien garde d'oublier les visages !
Nous vivions dans ce quartier aux petites maisons identiques : une grande pièce et deux petites, une cave et un jardin sur l'arrière, distantes d'à peine 3 m les unes des autres ... comme une grande fratrie, très solidaire, ne laissant personne de côté, ni dans l'embarras. Aucun n'était riche ! Nous avions tous quelques poules, quelques lapins et les légumes du jardin. Tout simplement, sans mots superflus, nous partagions avec les moins chanceux un bol de soupe, des oeufs, une part de clafoutis ... et le café à toute heure de la journée : la cafetière était toujours prête, au chaud sur la cuisinière !
La chasse et la pêche n'étaient pas aussi réglementées qu'à présent: poissons et gibier abondaient, améliorant l'ordinaire !
On veillait à ce que personne n'ait faim après les maladies, accidents, décès privant parfois certains du chef de famille ... solidarité qu'hélas nous ne retrouvons plus guère aujourd'hui !
C'était le quartier des mineurs, durs à la peine, résistants au mal, mais le coeur sur la main !
Ils aimaient bien blaguer aussi ... Devant les portes, il y avait presque partout un banc, fait de deux "séchoux" et d'une planche ... mais nous nous rassemblions presque toujours sur les mêmes, en bas du faubourg ... si bien qu'un jour où le banc était plein, je m'étais assise sur le rebord de ma grande bassine (en permanence sous le chenal en quête d'eau de pluie !) ; une légère tape sur l'épaule suffit à me déséquilibrer ... mon bain public, et ma peine à m'extirper de ma bassine, avaient mis tout le quartier en joie, moi la première !
Nous allions chercher l'eau à la fontaine des vieilles écoles, le lait à la ferme des Buttes ou à celle des Rivailles, le pain chez Lucien à la Gare ... mais c'était pareil, : on en portait pour tous !
On disait "monter à Lavaveix" : on empruntait le raccourci à flanc de butte ... puis le passage obligé sur le vieux pont aux planches disjointes ... jusqu'au carreau de la mine.
La butte faisait partie de notre vie : nous allions en choeur y ramasser l'herbe pour les lapins, y cueillir les mures pour la confiture, sans oublier tous ceux qui allaient trier le charbon et ramasser le bois pour se chauffer ... par nécessité ... ou simplement s'y promener le soir par les larges sentiers qui débouchaient juste en dessous du cimetière. Nos bandes de galopins les ont arpentés bien des fois, à la chasse aux lisettes, voire aux vipères, avec leurs lance-pierres !
Le point de vue, là-haut, est superbe en toutes saisons ; on voit très très loin ....
Jasmine
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